Présentation

Combinant une approche à la fois conceptuelle et expressive de la peinture, Hannah De Corte s’engage avec la surface picturale selon ses propres termes, explorant les paramètres qui lui sont inhérents. Elle travaille avec la toile comme partenaire iconologique, traitant le support de la peinture comme son médium. Travaillant à la fois avec et contre la matière, elle explore, engage et pousse ses propriétés vers l’abstraction et la métaphore.

 

Dans Hypervigilance, la deuxième exposition personnelle de l’artiste à la galerie, de nombreuses œuvres sont montrées à l’envers — on y voit le côté caché et fragile de la toile, qui devient l’œuvre en elle-même. De temps à autre, Hannah De Corte enlève même le châssis qui tend habituellement la toile. Pourtant, grâce à la peinture appliquée en couches épaisses sur l’autre face, la toile garde sa forme. La peinture traverse le tissu, formant des motifs abstraits qui évoquent parfois un test de Rorschach. Au lieu des agrafes habituelles, des fils colorés ferment les bords de la toile. Certains viennent directement de l’œuvre, d’autres sont récupérés d’autres peintures. Ces fils fins et vifs referment les contours autour du cadre disparu. Les œuvres, souples et légères (“soft paintings”), gardent la trace du rectangle rigide qui leur donnait leur forme. Les bords, eux, se sont relâchés.

 

Émotionnellement, l’hypervigilance est un état de survie caractérisé par une alerte constante. Le système nerveux est tendu et épuisé, sans cesse en train de scruter et prêt à réagir. C’est comme si la frontière entre le soi et le monde extérieur avait été rompue, et comme ces toiles qui « saignent », le soi devient hyperperméable : réceptif jusqu’à l’effilochage. Hyperfocalisé, chaque détail est amplifié et chargé.

 

Prolongeant son travail antérieur autour duquel les nœuds du tissu sont utilisés en tant que surface d’expressions pointillistes de la couleur, De Corte choisit ici les couleurs primaires cyan, magenta, jaune et noir — les mêmes que celles utilisées pour imprimer les images numériques. Elle s’intéresse aux liens entre les touches des peintres pointillistes ou impressionnistes et notre manière actuelle de voir les images, influencée par les écrans et l’imagerie numérique. 

 

De Corte expose actuellement dans la grande exposition collective Painting After Painting – La Peinture Contemporaine en Belgique au S.M.A.K. à Gand, visible jusqu’au 2 novembre 2025. Elle est lauréate d’une bourse de recherche Getty Scholars Grant du Getty Research Institute où, en 2026, elle mènera un projet sur les effets néfastes des techniques de conservation intitulé Tortured Pictures: Re-Reading Cubist Paintings in Light of Excessive Early Treatments.

Vues de l'exposition
Œuvres